Les chiens peuvent poser des gestes agressifs
06-06-2011
Jeudi dernier, j’ai été victime d’un incident que j’ai d’abord cru isolé. J’ai compris depuis qu’il s’agit de la manifestation d’un problème qui touche la sécurité et même la santé publiques. Je crois de mon devoir de citoyen de vous en informer. Voici.
Vers 19h30, je sortais d’une boutique gourmet bien connue de l’avenue Laurier avec deux sacs de café dans un sac de plastic. En marchant, j’ai vu que j’allais croiser un chien. Tout à coup, j’ai réalisé que le chien avait foncé sur moi. Le temps d’un éclair. Un très beau chien, noir à poil long, gros, puissant. Il avait la gueule entr’ouverte et on voyait une belle dentition et de la bave. Le chien était en laisse. La personne à l’autre bout de la laisse, une jeune femme, solide, tirait fort, à deux mains, pour éloigner son chien de moi. J’ai vite réalisé que mon sac était percé et que le café se répandait par terre. Le chien avait éventré mon sac d’un coup de crocs! J’étais fâché et effrayé. La femme s’est excusée. J’ai exigé qu’elle me paye le prix du sac de café abimé. Elle n’avait pas d’argent sur elle, mais après réflexion elle est allée en chercher dans une autre boutique tout près, où elle est manifestement connue; je l’avais suivie, elle m’a tendu l’argent. Je lui ai alors dit : « Mademoiselle, vous n’avez pas, moralement, le droit de vous promener avec cette bête‐là, comme ça, sur la voie publique. » ‐ « Pourquoi? » ‐ « Ben voyons! Elle est dangereuse! » . La femme m’a regardé, sure d’elle, avec un sourire de pitié. –« Vous ne connaissez pas du tout les chiens. Mon chien est gentil. » ‐ « Hé! Hé! Dites pas n’importe quoi, il m’a agressé, il a percé mon sac avec ses crocs! » Elle répond : « Il ne vous a pas agressé, il vous a juste senti ».
Voilà pour l’incident.
Je vous le dit: J’ai été encore plus inquiété par les propos de la jeune femme que par le comportement de son chien. Si elle avait manifesté une intention de prendre des mesures (ne plus sortir avec ce chien ou simplement lui passer une muselière en public), j’aurais été rassuré et je ne serais sans doute pas ici ce soir. Mais j’étais impressionné, inquiet. Et le lendemain, j’ai fait une déclaration à la police, puis j’ai discuté l’incident avec un vétérinaire d’expérience que je connais bien. Ses propos m’ont surpris et intéressé et ils vous feront peut‐être le même effet. Écoutez bien.
Il est souvent consulté par des personnes qui ont vécu une situation d’agression par un chien. Je vous cite assez fidèlement ses observations :
1. L’agression d’un humain par un chien est un problème endémique.
2. C’est un problème sensible : après une agression, il est fréquent que le propriétaire du chien en cause nie. « Mon chien ne peut pas avoir fait ça, mon chien ne mord pas, mon chien ne peut pas avoir mordu! » Le réflexe de négation est très répandu.
Exactement la position de ma madame de l’avenue Laurier!
Depuis, un fonctionnaire du fédéral à appelé chez moi. Agence d’inspection des aliments, Bureau de la santé des animaux. Ce bureau à une responsabilité concernant la propagation de la rage aux humains. Il s’inquiétait de savoir si j’avais moi‐même été mordu; ce n’est heureusement pas le cas. Ouf!
Selon ce que je constate, une double conclusion s’impose :
1. Les responsables de la sécurité et de la santé publiques doivent prendre des mesures avant que des incidents graves ne se produisent.
2. On ne peut pas compter sur une action volontaire des propriétaires de chien ni se contenter de les « responsabiliser ».
Je terminerai sur une suggestion, à savoir:
Que l’Arrondissement étudie la possibilité d’imposer le port de la muselière aux propriétaires de chiens de plus d’un certain poids lorsque leur chien est sur la voie publique. L’expert‐vétérinaire que j’ai consulté trouve ma proposition justifiée et pondérée. Selon lui, la mesure devrait toucher les chiens de 18 kilos et plus.
Je n’exclue pas la sensibilisation des propriétaires de chiens. Je crois même que ce sera nécessaire pour qu’ils acceptent la mesure. Nécessaire mais pas suffisant. Ma petite expérience et celle, considérable, du vétérinaire consulté, m’enseignent en effet qu’on ne peut pas se contenter de « responsabiliser » les propriétaires, mais qu’il faut réglementer.
Texte d’une intervention au conseil d’arrondissement d’Outremont par Jules Desrosiers
le 6 juin 2011