On l’appelait le parc de Vimy un peu par défaut, à cause sa proximité à l’avenue du même nom. Lors d’une cérémonie de dénomination à la mémoire de Jacques Parizeau, ce petit espace verdoyant sans nom a été baptisé officiellement le parc Jacques-Parizeau.
Plusieurs personnalités du monde politique municipal et provincial étaient présentes à cet événement de dimanche dernier, mais également, bien entendu, plusieurs membres de la famille de Jacques Parizeau, dont sa deuxième épouse Mme Lisette Lapointe.
Plusieurs discours émouvants ont été prononcés durant l’après-midi dont celui de Mme la mairesse Marie Cinq-Mars, de Mme Lisette Lapointe et de la fille de M. Parizeau ; mais également celui du président de la Société d’histoire d’Outremont, Me Jean A. Savard, que nous reproduisons ici intégralement :
Madame la mairesse
Membres de la famille de Jacques Parizeau
Membres de la Société d’histoire d’Outremont
Distingués invités
J’ai eu le privilège d’assister aux émouvantes funérailles nationales de Jacques Parizeau. Normalement, les funérailles d’un si grand personnage auraient dû se dérouler à la cathédrale Marie-Reine-du-Monde ou à la Basilique Notre-Dame. Mais voilà! Jacques Parizeau vouait un si grand attachement à la ville où il a vécu, Outremont, qu’il avait planifié qu’elles se déroulent à 200 mètres d’ici, à Saint-Germain d’Outremont, sa paroisse.
Mis au courant, peu après, que la mairesse Marie Cinq-Mars désirait consulter la Société d’histoire d’Outremont sur la pertinence de nommer un lieu public d’Outremont en l’honneur de Jacques Parizeau, j’ai immédiatement réuni le comité exécutif de la SHO qui, à l’unanimité, m’a mandaté de lui faire part de notre recommandation de changer le nom de parc De Vimy en celui de Jacques-Parizeau.
Le 9 juillet 2015, je lui faisais parvenir une lettre que je me permets de vous lire :
« Madame la mairesse,
« Lors de sa dernière réunion le 7 juillet dernier, le comité exécutif de la Société d’histoire d’Outremont a adopté à l’unanimité une résolution me mandatant de vous faire part d’une demande, soit de changer le nom du Parc de Vimy en celui de Parc Jacques-Parizeau. Les raisons coulent de source.
1. Jacques Parizeau a vécu une bonne partie de sa vie sur l’avenue Robert, face au Parc de Vimy.
2. Une stèle en l’honneur de sa première épouse Alice y est déjà érigée.
3. L’attachement de Jacques Parizeau envers Outremont était indiscutable. Il a même insisté pour que ses funérailles aient lieu à l’Église St-Germain d’Outremont, de préférence à des lieux plus imposants comme la Basilique Notre-Dame ou la cathédrale de Montréal.
4. Outremont a le devoir de commémorer ceux de ses citoyens qui sont devenus premier ministre, ce qu’elle a d’ailleurs fait dans le passé pour Pierre-Elliott Trudeau et Robert Bourassa.
« Le nom de Vimy continuera à être commémoré puisque l’avenue de Vimy conserverait son nom.
« En espérant que notre demande recevra un accueil favorable, je demeure,
« Votre tout dévoué. »
En octobre 2015, le conseil d’arrondissement donnait son aval à cette proposition qui fut définitivement entérinée par le conseil municipal de Montréal le 21 juin 2016. La suggestion que nous avons faite n’était pas le fruit du hasard. Comment honorer dignement un si grand personnage dans un arrondissement où tout est construit, qui compte 77 avenues, 15 parcs et 4 places publiques, tous remplis d’histoire? Nous avons éliminé les doublons, les redondances, comme nous l’avons fait récemment avec le parc Dunlop sur la rue Dunlop, qui se nomme maintenant parc Jacques-Tessier, ou avec le parc Stanislas, situé devant le collège Stanislas, renommé parc Raoul-Dandurand, en l’honneur de son cofondateur.
En nommant le parc De Vimy « parc Jacques-Parizeau », tout en conservant le nom d’avenue De Vimy, nous croyons respectueusement avoir atteint le but.
J’en veux pour preuve non pas un, mais deux éditoriaux parus dans La Presse du 23 juin 2016. Le premier de Paul Journet dit ce qui suit : « Jacques Parizeau mérite un lieu à son nom à Outremont. Malgré les apparences, le choix du parc De Vimy est idéal. Un lieu se démarquait : le petit parc De Vimy devant lequel M. Parizeau a habité pendant près de 4 décennies. C’est là qu’il aimait marcher et c’est aussi là que se trouve une stèle pour sa première femme. Cela ne fait pas disparaître "De Vimy" d’Outremont. L’avenue du même nom demeure. D’ailleurs, le parc n’avait jamais été baptisé. Il portait ce nom par défaut à cause de la rue qui le borde. On n’enlève que le doublon. Et on le fait par respect de l’histoire. »
Le même jour, l’éditorialiste Alain Dubuc abondait dans le même sens. « Il me paraît raisonnable qu’une société honore ses grands personnages. Jacques Parizeau, comme Premier Ministre et comme grand artisan de la Révolution tranquille, fait partie des hommes d’État québécois qui méritent un tel hommage (…) Le choix de ce parc tombait sous le sens. C’est le lieu où M. Parizeau a vécu des décennies à Outremont, sur la rue Robert [le 40 précisément], qui donne sur le parc. C’est dans cette maison qu’il écrivait ses budgets. C’était donc le lieu naturel pour qu’Outremont salue l’un de ses citoyens. »
J’ai rencontré Jacques Parizeau en 1970, lors de sa campagne électorale dans Ahuntsic. C’était une assemblée de cuisine. Mon jeune voisin de droite lui posa une question assez alambiquée. Je me souviens de la réponse de M. Parizeau. « Jeune homme, quand vous aurez passé les 3 tests, je répondrai à votre question. » ̶ « C’est quoi, les 3 tests? », demanda-t-il. Et Monsieur de répondre : « Avoir une femme, un enfant et une hypothèque. »
Monsieur Parizeau, j’ai passé les trois tests, ce qui me donne le droit non pas de poser une question, mais de formuler le vœu sincère et légitime que ce parc contribue à perpétuer votre mémoire et votre œuvre pour les générations à venir.
Jean A. Savard
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