Pour paraphraser une chanson de Charles Aznavour, je vous parle d’un temps que les moins de 50 ans ne peuvent pas connaître. C’est celui du lointain mais fascinant parcours d’un rêve humain plus grand que nature. Celui de Mgr Paul-Émile Léger (1904 -1991), archevêque du diocèse de Montréal, qui renonça à ses fonctions et privilèges pour devenir, en 1967, simple missionnaire en Afrique durant 12 ans.
Un geste inédit dans l’histoire de l’Église catholique. L’organisme de bienfaisance Mission inclusion, qui fut jusqu’à l’an dernier L’Oeuvre Léger1, poursuit sa quête et son inspiration : améliorer les conditions de vie des personnes vulnérables et marginalisées au Québec et ailleurs dans le monde. Si le projet caritatif existe depuis 1949, il a pignon sur rue à Outremont depuis 30 ans.
Même quête, autre temps
Bien sûr, le contexte a changé depuis sept décennies. Richard Veenstra, directeur général de l’organisme, rappelle à juste titre qu’ « à l’époque, les œuvres de charité étaient appuyées financièrement par les communautés religieuses alors qu’aujourd’hui, c’est l’État et la philanthropie qui les soutiennent. » Les causes de la détresse humaine ont évolué. Les maladies endémiques comme la lèpre, puis le sida, étaient particulièrement virulentes à l’époque. « Aujourd’hui, on fait face aux changements climatiques, aux déplacements de populations, à un contexte social qui favorise l’exclusion dans plusieurs milieux », constate-t-il. Mission inclusion offre un appui financier aux groupes communautaires locaux qui connaissent les enjeux, autant au Québec qu’à l’étranger. On vise surtout à donner des outils pour briser l’isolement, multiplier les liens permettant de sortir de la misère.
Contrer l’isolement des jeunes, des aînés et des itinérants au Québec
Pour le Québec seulement, l’organisme a acheminé l’an dernier 1,7 M $ à différents groupes voués au mieux-être des enfants, des familles, des aînés, des itinérants. Les fonds viennent des campagnes de financement, des commanditaires, d’événements spéciaux et de dons privés. Moins de 20 % des dons vont aux frais administratifs, nous rassure M. Veenstra. « À l’heure actuelle, nous avons 68 projets au Québec dans 11 régions ». Par exemple, l’organisme soutient à Montréal La Tablée des chefs qui offre aux ados au sortir de la DPJ d’acquérir une expertise en cuisine et de se retrouver dans un milieu stimulant. On encourage les cuisines collectives et les maisons de la famille, une bonne occasion de tisser des liens. L’Itinérant est également soutenu pour ses efforts dans la réinsertion sociale des gens marginalisés.
Soutenir les victimes des crises humanitaires
Autre contexte, celui des crises humanitaires dans le monde. En 2019, Mission inclusion appuie des projets dans 12 pays en Amérique, en Afrique et en Asie. Il s’agit en majorité des projets d’assistance à des populations déplacées à cause de la radicalisation de groupes armés ou des catastrophes naturelles. Encore une fois, le soutien se fait en collaboration avec des groupes locaux qui connaissent le système. Un intérêt particulier est porté aux projets qui visent à protéger les droits des femmes et à prévenir la violence basée sur le genre, comme ce fut le cas au Nigéria et au Burkina Faso. On cherche aussi à développer l’autonomie pour faire face à d’éventuelles nouvelles crises. Cette année, 11,3M $ ont été déployés pour ces projets, dont environ la moitié vient du fédéral, et dans une moindre mesure, du ministère des Relations internationales et de la Francophonie (Québec), et l’autre moitié provenant de différentes fondations, corporations et donations privées.
De plus en plus d’exclusions
Dans un contexte où la mixité humaine est de plus en plus complexe, M. Veenstra reconnaît que l’exclusion et l’isolement risquent de frapper fort dans l’avenir. Les aînés n’ont plus le statut particulier qu’ils avaient dans leurs familles, les populations déplacées ont perdu leurs repères, de plus en plus d’enfants sont laissés à eux-mêmes, les femmes et les autochtones deviennent nombreux dans l’itinérance. Un sujet de réflexion obligé en cette période de festivités familiales.
Mission Inclusion est chapeauté par un Conseil d’administration et emploie 40 personnes qui planifient le financement, gèrent les ententes avec les bailleurs de fonds, développent la participation de l’organisme, analysent l’efficacité des projets des différents partenaires communautaires au Québec et dans les pays concernés. Le siège social de l’organisme est sur l’avenue de l’Épée au sous-sol de l’église St-Viateur.
1 La raison sociale de Mission inclusion est La Fondation Jules et Paul-Émile Léger, en vertu d’une loi sanctionnée en 1981 par la Chambre des Communes.Partagez sur